La politique d’utilisation de l’IA en entreprise serait-elle un écran de fumée face aux enjeux réels de la souveraineté numérique ?

Depuis plusieurs semaines dans les couloirs des entreprises résonne de plus en plus fort l’écho d’une préoccupation grandissante concernant l’utilisation de l’Intelligence Artificielle par les collaborateurs. Les directions juridiques et informatiques s’empressent de rédiger des politiques internes, motivées par la crainte – légitime en apparence – de voir des données sensibles s’échapper via ces nouveaux canaux d’échange.

🤖 Le contexte actuel :

Les plateformes d’IA générative (ChatGPT, Claude, DeepSeek, Mistral…) affichent une transparence louable dans leurs politiques de confidentialité. Elles assument pleinement la collecte et la conservation des données utilisateurs sur leurs serveurs, qu’ils soient américains, chinois ou français.

⚠️ Mais attention : concentrer nos inquiétudes uniquement sur ces nouveaux outils révèle une forme de myopie stratégique.

📊 CLOUD Act : Quand le droit américain s’invite dans nos données européennes :

Depuis mars 2018, le CLOUD Act (Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act) a considérablement renforcé l’emprise du droit américain sur nos données. Cette législation permet aux autorités américaines d’accéder aux données hébergées sur des serveurs « non-américains », créant ainsi une brèche significative dans l’efficacité du RGPD.

🎯 Un point crucial souvent négligé : les hébergeurs soumis à la loi américaine peuvent transmettre ces données sans même en informer leurs propriétaires, qu’il s’agisse de personnes physiques ou morales.

 

💻 L’ampleur vertigineuse du phénomène :

Plongeons dans des chiffres qui donnent le vertige. Microsoft 365 domine le marché avec plus de 345 millions d’utilisateurs payants en 2024 [https://www.microsoft.com/en-us/investor/earnings/fy-2024-q2/press-release-webcast], représentant plus de 2 millions d’entreprises dans le monde. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Chaque jour, un tsunami de données sensibles transite via :

🔑 La différence fondamentale :

Si l’utilisation de l’IA implique un consentement actif à la collecte de données, nos infrastructures numériques quotidiennes opèrent une collecte passive, souvent invisible mais tout aussi réelle.

⚖️ Le paradoxe actuel :

Les géants américains exercent un quasi-monopole sur :

  • Les serveurs d’hébergement
  • Les systèmes d’exploitation
  • Les navigateurs internet
  • Les solutions de messagerie
  • Les outils collaboratifs

🔍 Le risque ne vient donc pas uniquement de l’usage de l’IA, mais de notre infrastructure numérique elle-même.

Les entreprises s’inquiètent des chatbots, mais combien ont mis en place une politique de chiffrement de bout en bout (AES-256) pour leurs e-mails et documents sensibles ? Hormis les banques et quelques organisations stratégiques, l’immense majorité des entreprises stocke et échange des données critiques sans réelle protection.

Bien sûr, réguler l’usage de l’IA en entreprise est une nécessité, mais ce n’est qu’un pan du problème. Ces dernières, bien que nécessaires, risquent de n’avoir qu’un effet placebo si elles ne s’inscrivent pas dans une stratégie globale de protection des données.

🌐 En somme, la véritable question est : voulons-nous vraiment protéger nos données ou simplement donner l’illusion de le faire ?

Dans ce contexte, adopter une politique IA sans repenser l’ensemble de notre système d’information, c’est comme mettre un cadenas sur une porte grande ouverte, qui ne nous laisse comme solution que la confiance accordée au gouvernement américain pour un usage raisonné de son pouvoir régalien.

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